La généalogie réserve parfois des surprises, et l'enquête sur Eugénie Clotilde Garnier en est une parfaite illustration. Qui était-elle vraiment ? Comment retracer son parcours alors que les archives semblent ne livrer que des fragments d’informations ? C'est ce que nous allons découvrir.
Un point de départ fragile
Tout commence avec un acte de naissance : celui de Georges Garnier, né le 11 juin 1874 à Paris 5e. Sa mère, Eugénie Clotilde Garnier, est indiquée comme domestique, âgée de 24 ans et résidant rue Mazagran à Paris. Aucune mention du père. Ce simple détail complique les recherches : avec un nom aussi répandu que "Garnier", comment retrouver ses origines ?
L'acte de reconnaissance de l’enfant daté du 26 juin 1874 ne nous apprend rien de plus. En l'absence d'un mariage pour Eugénie, il devient indispensable d'explorer d'autres pistes : les actes de naissance, mariage et décès de son fils Georges.
Des indices dans les actes de son fils
L'acte de mariage de Georges, en 1900, est mentionné dans son acte de naissance. Il précise que sa mère réside à Cheu dans l’Yonne. Plus tard, en 1932, l’acte de de décès de Georges décrit sa mère comme sans profession, domiciliée à Sormery dans l’Yonne. Cela signifie qu’elle est toujours vivante en 1932.
Un tournant dans l'enquête
Eugénie Clotilde Garnier est donc née vers 1850 et décédé après 1932 peut-être dans le département de l’Yonne. En saisissant ces données, Filae propose un acte d'état civil à Orléans en 1850. L’enfant mentionnée dans cet acte a été exposée (abandonnée). Un billet rédigé par le curé de Montereau indique qu’elle a été baptisée "Clotilde Eugénie", fille de Rosalie Garnier, domestique.
Serait-ce la même personne ? La confirmation n’est pas encore totale.
Des documents déconcertants
Nous partons à la recherche d’Eugenie Garnier dans l’Yonne. Les recensements de 1906 à Cheu (Yonne) révèlent une "Eugénie Garnier", née en 1851 à Montereau (Loiret), épouse d’Eugène Goulley, avec une fille Clotilde Goulley née en 1886.
Partons à la recherche du couple.
Nous trouvons un ban en 1882 qui précise que la future épouse a 32 ans, donc née vers 1850, demeure à St Florentin, précédemment à Melun en Seine-et-Marne fille de père et mère non dénommée…
Nous lançons une recherche sur le nom Garnier à St Florentin lieu des bans en classant les actes par date.
Surprise, il y a un autre ban entre Eugène Victor Goulley et Henriette Garnier… 7 jours après le premier, les renseignements sont les mêmes sauf le prénom de l’épouse et un détail supplémentaire. Elle est née à Montereau dans le Loiret.
Le mystère s’épaissit…
Une identité double ?
La recherche d’un acte de naissance à Montereau (Loiret) ne révèle aucune "Eugénie Clotilde" née en 1850. Nous recherchons donc des naissances Garnier sans prénom. Un acte d’Henriette Garnier, fille de Rosalie Garnier, née le 10 mai 1850, existe bel et bien.
Tout semble indiquer qu'Eugénie Clotilde et Henriette sont la même personne :
- Elle officiellement déclarée "Henriette" à l’état civil à Montereau
- Elle est baptisée sous le nom de "Clotilde Eugénie" selon un billet laissé avec elle à Orléans et abandonnée et prise en charge par l’assistance publique.
- Elle ensuite connue sous le nom "Eugénie Clotilde" notamment à Paris en 1874 lorsqu'elle donne naissance à Georges.
- Nous la retrouvons ensuite à partir de 1882 sous le nom "Henriette" lorsqu'elle se marie.
- Elle est cependant toujours désignée "Eugénie Clotilde" dans les actes de son fils.
L’hypothèse la plus probable est qu’au moment de son mariage, les recherches pour obtenir son acte de naissance ont révélé son véritable nom à l’état civil, ce qui a conduit à l'utilisation du prénom Henriette.
La dernière pièce du puzzle
Les tables de successions et absences de Saint-Florentin (Yonne) indique qu'Henriette Garnier est décédée le 22 juillet 1937 à Sormery, veuve d’Eugène Goulley. Elle a donc porté deux identités tout au long de sa vie.
Pour aller plus loin, la consultation des archives sur les enfants abandonnés et placés aux archives départementales pourrait fournir d’autres renseignements et étayer ces recherches.
Cette fascinante enquête montre l'importance de croiser les sources, d'examiner chaque détail et d'explorer les archives sous différents angles. Un simple changement de prénom peut complètement brouiller une recherche généalogique.